Cinéma : 47 Ronin : le film

Je ne sais pas si ce film pâtit d’un délit de sale gueule ou au contraire de trop hautes attentes après 2 ans à moisir en salle de montage, mais j’ai du mal à comprendre les mauvaises critiques. Certes, l’écriture n’est pas parfaite ni d’une grande originalité. Mais ça fait longtemps qu’on n’a pas vu un film de samourais et celui-ci est mâtiné de fantastique, alors ma foi ça compense. De plus, elle est inspirée de la légende réelle des 47 Ronin, que je ne vous raconterai pas pour ne pas ruiner la surprise, si vous ne la connaissez pas.

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Oishi, visage familier

Certes, il y a quelques bugs dans le scénario, mais comparé à beaucoup de blockbusters sortis ces derniers années dont certains portés aux nues (Gravity par exemple, dont l’histoire tient sur un timbre-poste et demande de sérieusement s’accrocher à la « suspension of disbelief », comme on dit in English (1). Pour ne pas parler de la catastrophe qu’était Prometheus), il tient quand même bien debout.

L’affiche montrée ici est trompeuse : on voit à peine le tatoué (joué par Rick Genest), et il manque le deuxième personnage principal, Oishi, le chef des ronin qui vont vouloir venger leur maître (joué par Hiroyuki Sanada). Un Rônin est un samourai sans maître, soit qu’il ait été banni, soit qu’il ait déserté. En revanche, on a droit à des paysages somptueux, des décors impressionnants, des costumes magnifiques et des effets spéciaux réussis (à quelques scènes près). La mise en scène fait la part belle aux gros plans et nous épargne la plaie actuelle des films d’action : les scènes tournées à l’épaule.

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Keanu et Jin

Alors vous me direz, Keanu Reeves n’est pas très expressif. C’est un poncife. Il ne l’est pas tant que ça, il est dans la retenue. Etant donné le genre, et son rôle de sang-mêlé paria, il s’intègre parfaitement. D’ailleurs, le film n’est jamais meilleur que quand il laisse aux acteurs le soin de transmettre les émotions sans expliquer leurs états d’âme. Jin Akanishi, également chanteur de J-pop et acteur de drama, qui joue le fils d’Oishi, n’a presque pas de texte. On suit pourtant bien son parcours de jeune homme tentant de se faire reconnaître comme un homme par son héros de père. D’autres personnages parviennent à exister : le seigneur d’Asano, sa fille la princesse Mika, la vilaine sorcière et le méchant de service (joué par Tadanobu Asano, qui a à peine besoin d’ouvrir la bouche pour qu’on sache que c’est lui le vilain).
Bref, un film qui en met plein les yeux dans un Japon médiéval fantastique peu vu en dehors des dessins animés. Carl Rinsch, le réalisateur, a donc techniquement rempli son contrat, même si financièrement, le flop du film aux USA et au Japon n’a pas permis de remboursé son budget conséquent.

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En fait, je pense le film a été laminé par les nippophiles intégristes qui ont rejeté en bloc l’idée que Keanu Reeves soit parachuté dans la légende des 47 Ronins (procédé fréquemment utilisé par les Américains, on le sait, et c’est mââââl), ou qu’on y intègre des monstres (pourtant tirés de l’imagerie folklorique japonaise). Et incompris par ceux qui ne s’intéressent pas à la culture nippone et qui s’attendaient à un pur produit US. Par exemple j’ai trouvé des critiques qui se plaignent du manque d’émotion qui transparaît. Mais bon, ce sont des samourais. Il y a beaucoup de non-dit dans la culture japonaise et en particulier pour les guerriers. Ils ne vont pas venir chouiner comme des lavettes pour expliquer qu’ils doivent venger leur maître : ça va de soi. De plus, il suffit de regarder des films japonais mettant en scène des samourais, comme Gohatto de Nagisa Oshima, pour voir que le jeu des acteurs est dans le même registre.

Personnellement je n’ai eu aucun mal à m’attacher à eux (et notamment à la rectitude d’Oishi pourtant plus monolithique que Keanu Reeves). D’autant plus qu’ils ont, pour la plupart, une noblesse morale et des qualités humaines. Là où beaucoup d’auteurs jouent en ce moment, en télé comme en cinéma, la carte de l’anti-héros et des galeries de personnages tous plus antipathiques les uns que les autres.

1) Il paraît qu’il faut dire « suspension d’incrédulité » en français.

2 réflexions au sujet de « Cinéma : 47 Ronin : le film »

  1. Je suis totalement d’accord avec ce que vous avez écrit.
    Et je dois ajouter que j’ai vraiment aimé le 47 ronin.
    Merci.

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