Suite de mon itinéraire de fan (plus ou moins) gâtée.
2) Le plateau
Les concerts, conventions et séances de dédicaces ne m’ayant pas donné l’occasion d’une conversation dépassant la phrase avec James Marsters, j’ai même acheté un billet VIP incluant une « cocktail party » à 25 personnes. Où on était 26 pigeons « invités », parce que les organisateurs ne savaient pas compter. Et où quand môssieur Marsters est arrivé aux deux dernières tables dont la mienne, il a demandé qu’on se regroupe autour de la même, parce qu’il était en retard donc il fallait qu’il fasse vite.
En retard pour quoi, on se demande, vu qu’il séjournait un étage plus bas dans les suites VIP de l’hôtel, et qu’il était tard donc je doute qu’il ait eu un rendez-vous professionnel prévu. Sans doute craignait-il de se transformer en citrouille ou en crapaud passé minuit. Déjà qu’il était arrivé en habit du dimanche (du dimanche à glander devant la télé, j’entends)… Moralité, on était 8 fans autour de la table au lieu des 4-5 des autres tables. La conversation étant monopolisée par deux Anglaises et une chanteuse amateur qui parlaient d’elles-mêmes, l’échange s’est réduit à la portion congrue : 1 phrase de ma part, et 3 mn où il a dû parler contre 7 mn occupées par les autres fans. Z’êtes sympas, mais j’ai des heures entières pour discuter avec les fans, moi.
Plus tard, un autre pack VIP, moins cher mais déjà trop, était censé nous garantir un concert en petit comité et un dîner où il ferait le tour des tables. L’occasion de rattraper le raté de la fois précédente? Que nenni. Le concert a été de loin son plus mauvais – de ceux auxquels j’ai assisté, du moins. (Une fan avec qui j’ai longuement discuté ensuite m’a dit que j’avais eu plutôt de la chance dans les concerts que j’avais vus, elle qui en avait supporté de bien plus nuls avant de laisser tomber).
Quant au dîner VIP, son manager de l’époque, Steve Himber, étant un radin doublé d’une bille en matière d’organisation, ça s’est fini en séance dédicace dans le restaurant prévu, un simple pub, avec un buffet de bouffe de pub. Ca fait cher de l’aile de poulet au gras et des 10 secondes de banalités habituelles. J’étais tellement ravie que j’en ai vomi dans les toilettes. Un peu de fatigue, de décalage horaire, et de nourriture trop riche, j’imagine, mais sans doute un peu aussi de dégoût devant le foutage de gueule manifeste
Rétrospectivement, je regrette un peu d’avoir pris la peine de sortir de la file d’attente des autographes : j’aurais dû leur vomir dessus, à lui et à Steve.
Le concert du lendemain étant un peu meilleur, cela a confirmé mon sentiment que James n’avait tout simplement pas répété avant de venir. Et pour un musicien dilettante, ça ne pardonne pas. A l’époque j’étais plus jeune et moins armée : je pense que si ça se reproduisait maintenant, j’irai taper un scandale pour réclamer ce qu’on m’a vendu, et non un ersatz… D’ailleurs je considère toujours qu’au vu de ses nombreux ratages, James Marsters me doit quelques centaines d’euros pour services payés et non rendus.
D’un certain point de vue, c’était le point culminant (ou le point le plus bas, suivant le point de vue) de ma fanitude, en tout cas au niveau dépenses, temps investi, et tentatives de communication.
Suite à ces déboires, et un ras-le-bol de ses fans trop extrêmes, je voulais quitter ce fandom. Mais comme être fan est une drogue, j’avais besoin d’une méthadone pour décrocher.
Pour me changer les idées et mettre à profit mon nouveau goût des voyages, j’ai pris un billet de Thalys pour aller en vacances en Allemagne au bord du Rhin. J’avais décidé d’être pragmatique : c’était pas cher, pas loin et j’ai fait allemand 2e langue : tant qu’à voyager, autant en profiter pour enrichir mon CV d’une ligne. Et puis j’avais une copine de fandom en Allemagne, avec qui je correspondais depuis des années sans qu’on se soit jamais rencontrées. Ce serait l’occasion, au passage.
C’était en août 2006. Partout où j’allais, de Cologne à Coblence, je tombais sur des posters de ce groupe de 4 mioches au nom et au look improbables, Tokio Hotel. J’ai ri de ce qu’on arrive à vendre vraiment n’importe quoi aux ados.
(vous allez voir, il y a comme une espèce de schéma récurrent dans mon parcours de fan… Non, pas le fait qu’ils aient tous des goûts de chiotte en matière de fringues. Quoique, ça aussi)
La bouille de bébé vampire androgyne de Bill Kaulitz m’amuse, j’en plaisante sur internet. La copine allemande sus-citée me répond « AARGH NON, PAS EUX! » (la plupart des allemands overdosaient de les voir partout, et ne peuvent toujours pas les voir en peinture). Elle m’envoie néanmoins deux de leurs chansons en MP3 (je ne m’attarderais pas sur le fait qu’elle les avait sur son ordi…).
Schrei ne me convainc pas plus que l’extrait qui se lançait sur le site officiel du groupe : trop gueulard, trop simple, trop exactement ce que je m’attendais à entendre devant ce look d’ados « tro rebelz man! ». Par contre, la ballade Rette Mich, malgré la voix pré-pubère de Bill, me fait tendre l’oreille. Et écouter tout l’album, pour voir (enfin vous comprenez l’idée). Et à mon grand étonnement, aimer l’album (sauf Schrei et le bonus Thema N°1). C’est frais, rock, avec de jolies mélodies, c’est plaisant à chanter, et y’a pas à dire, j’adore la langue allemande, ça change de l’anglais.
J’envisage même d’aller les voir en concert le 1er septembre 2006 à la Lorelei, juste pour le côté surréaliste et parce que c’est l’anniversaire des jumeaux-bébés, mais je renonce. Quand les marmots déboulent en France en septembre 2006, je me pointe après le boulot à leur toute première dédicace à la Fnac Saint-Lazare, en pensant faire du soutien moral à un petit groupe inconnu ici, les pauvres petits gosses.
Je n’arriverai pas à entrer dans la Fnac : avant même la sortie de l’album en France, les ados s’étaient passé le mot via Internet, et une horde de lolitas plus ou moins gothiques se presse là. Je me sens légèrement pas du tout dans la cible, alors je m’éloigne du fandom. Je rate le premier concert parisien au Trabendo, celui de Lyon (parce qu’à l’époque je me dis que quand même, je ne vais pas aller jusque là pour un groupe que je connais à peine et qui, si ça se fait, est une pure invention médiatique incapable d’aligner deux notes en concert), le deuxième concert parisien au Bataclan…
Mais quand même, après avoir été bluffée par leur Trabendo Session acoustique sur Europe 2 TV, je me dis que je ne vais quand même pas laisser ça aux gamins moutards ados sous prétexte que je suis trop vieille et que le groupe a zéro crédibilité. D’autant que bon, j’ai fait des centaines de kilomètres pour voir en concert « le mec qui joue le vampire peroxydé dans Buffy ». Et il n’était même pas bon musicien. Alors je ne suis plus à ça près. Le ridicule ne tue pas, l’ennui si.
Donc je vais les voir, à ce qui s’appelait encore le POPB, le Palais Omnisport de Paris Bercy (oui, en 3 concerts ils sont passés du Trabendo au POPB, vendu en 30 mn). Ils sont bons, et en plus ils ont un effet euphorisant tout à fait inattendu. Comme méthadone fandomique, c’est du premier choix. Rien que du bonheur, pas d’effet secondaire (à part devoir cacher qu’on est fan parce que c’est la honte, surtout à mon âge). Ils doivent diffuser de la coke dans l’air durant les concerts, je ne sais pas. J’étais arrivée à Bercy après une journée de travail, fatiguée, grippée et sous Fervex, avec la tête comme une pastèque. J’en repars sautillant comme un cabri, avec un sourire jusqu’aux oreilles. Sérieusement, la musicothérapie, ça marche.
En suivant l’actualité du fandom, je vois des vidéos d’eux tout sourire, signant des autographes à la pelle devant leur hôtel. Jusque là, je considérais comme irrespectueux et intrusif de faire ça, mais ils ont l’air d’être encore assez jeunes pour être contents de voir du monde. Et puis ça fait la buse. Le buzz. Enfin le machin, là, avec lequel on remplit des émissions de télé. S’ils ne veulent pas signer, ils peuvent sortir par derrière ou passer planqués, d’autres le font. Mais ils se prêtent à l’exercice de bonne grâce.
Alors j’y vais aussi. Et en vrai comme en vidéo, ils font le même effet que regarder des chatons (bon ok, surtout Bill. Les autres font plutôt chiots foufous, c’est marrant aussi). Les apercevoir me fait sourire niaisement.
De plus, ça booste mon moral, parce qu’avec eux j’ai de la chance. Tout se déroule facilement (ça fera l’objet d’un autre article). C’est comme aller à la chasse en étant sûr de tirer son coup ramener une prise. (Pardon). L’enquête et la traque, c’est assez ludique. Et encore, j’ai quelque éthique, donc je me suis posé pas mal de limites à ne pas dépasser. Je suis loin d’égaler certains « limiers » du fandom, qui me font un peu peur.
Mon fandom précédent m’ayant donné le goût des voyages, je continue avec eux, d’autant plus volontiers que EUX ne me font jamais regretter le prix du billet de concert, qu’ils vont dans des villes que je voulais de toute façon visiter, et que les autographes sont gratuits (à cette époque).
Question investissement en temps et en argent, on est au même niveau que James Marsters, à une différence majeure près : je cherchais à discuter avec Marsters, pour voir si mon attirance pour lui était motivée par autre chose que son physique et son habileté à charmer son monde. J’aimais sa musique, mais ce goût a disparu avec l’attraction (encore qu’en mettant en ligne le concert du Carling, je me rends compte que les 2 nouvelles chansons de ce concert me plaisent encore. Dommage qu’il les ait sabordées par la suite).
Alors que Bill et ses potes, j’adore leur musique, mais je ne peux pas dire que je me trouve beaucoup d’atomes crochus avec eux… A part avoir grandi dans un petit patelin où je me sentais extra-terrestre. En 2007, j’avais juste envie de leur donner des choco-BN et de leur dire de ne pas écouter les connards qui les critiquent. Je ne crache pas sur une éventuelle occasion de leur parler, que je finirai par obtenir (enfin, 15 secondes chacun) en 2009, mais sans plus. Si je les suis de près, c’est parce que les voir est toujours une petite piqûre de bonheur**, qui s’ajoute au gros shoot des concerts et à l’intraveineuse en continu dans mes écouteurs.
Comme en plus, d’un point de vue professionnel ils assurent, et que c’est bien organisé (Deutsche Qualität), je n’avais aucune raison d’arrêter… enfin jusqu’au moment où trop de fans ont dérapé et où c’est devenu évident que ça commençait à les soûler. Et si bébés tristes, moi triste (leur break de 4 ans leur a fait du bien, pourvu que ça dure). Du coup l’effet euphorisant marchait moins.
Et puis il faut dire ce qui est… Comme tout drogue, il y a accoutumance. Autant au niveau des concerts, je continue de m’éclater, autant pour les à-côtés (sortie d’hôtel, etc), plus ça va et plus je suis blasée. Après avoir atteint ce qui je pense sera le summum avec un showcase accoustique idéal (je n’étais pas très bien placée, mais je n’aurais pas dû être dedans, alors j’étais déjà ravie) + dédicace au calme avec le temps d’échanger quelques mots avec un groupe en pleine forme, content de revenir, et un Bill au look de princesse égyptienne à côté de qui Râ dans Stargate fait figure de laideron, le reste me fait moins envie.
A suivre la semaine prochaine…
** référence que seuls les fans comprendront.
je n’ai qu’une seule chose à dire bravo car entre Masters et Tokyo Hotel tu as été très persévérante avec ces célébrités, je ne sais pas si j’aurais pu en faire autant. C’est une sacré expérience de fan, et j’imagine pour avoir vécu aussi un peu cela de l’intérieur que sur certains événements tu devais aussi retrouver souvent les mêmes têtes . Super article merci et bonne journée.
Oh c’était aussi pour l’expérience, au bout d’un moment. J’avais l’occasion de le faire donc j’ai tenté. Au final, avec Marsters ça n’a pas été concluant d’un point de vue de fan, par contre je crois y avoir pas mal gagné en débrouillardise et confiance en moi à force de barouder 🙂
Et oui, je te confirme qu’au bout d’un moment on croise souvent les mêmes têtes parmi les fans! Ce qui est parfois bien et parfois moins.
Bon ok j’ai pleuré de rire devant cet article, bourré d’auto-dérision, d’humour et de référence à faire friser le papier peint (=> »et un Bill au look de princesse égyptienne à côté de qui Râ dans Stargate fait figure de laideron » je me suis faite la même réflexion en la photo dis donc !)
Sinon niveau frustration fandomique, tu ne veux pas rejoindre celui de Sherlock : on attends 3 ans pour 3 épisodes et on se fait tancer par un Moftiss infernal mode cynique et pince sans rire. Sinon ils sont gentils, agréables, drôles et souriants. 😉
Ah mais ce showcase+dédicace à Cologne en 2009, pour moi c’est le summum du cul bordé de nouilles que j’ai eu avec TH. Outre que je n’étais même pas censée y assister faute d’invitation, les chansons en acoustique étaient top, ça a même réussi à me faire aimer le single que je trouvais franchement moyen. Ce fut le mieux organisé de mes autographes d’eux (et la seule fois où j’ai eu les 4, d’ailleurs). Et c’était également, à mes yeux, un des 2-3 meilleurs looks de Bill. Moi qui d’habitude ne suis guère troublée par lui parce que c’est un petit bouchon (qui me dépasse d’une bonne tête même sans talons, certes), là il était tellement surréel et surréellement beau que j’en ai buggé. Même sans Photoshop. J’ai tellement, tellement de regrets qu’il ait complètement changé de style depuis. Et tellement, tellement pas de regrets, du coup, d’avoir vécu à fond mon trip de fan à cette époque là, par exemple en voyageant jusqu’à Cologne sans certitude de les y voir.
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