J’ai ouï dire, il y a quelques semaines, qu’une nouvelle terrasse temporaire allait ouvrir à Paris, le Perchoir de l’Est.
En plus c’est dans un quartier où j’ai l’occasion de passer souvent, sur le toit de la Gare de l’Est. Tiens, me dis-je, ça peut être sympa s’il fait soleil, il n’y a pas beaucoup d’endroits où buller en faisant son stock de vitamine D dans le quartier. J’ai l’occasion par hasard d’en parler avec une dame qui travaille dans le coin, qui me dit qu’elle a essayé d’y aller il y a quelques jours et que ce n’était pas encore ouvert, ils avaient du retard, conditions de sécurité paraît-il.
Je passe à la Gare de l’Est, et repère sur le côté sud-est du toit quelques parasols, quelques silhouettes pas très pressées. Ca doit être là – mais vu le peu d’activité, soit c’est encore fermé, soit il n’y a pas grand-monde. Je regarde dans la Gare : point de panneau indiquant le nouveau lieu. Point d’accès, d’ailleurs, pour l’étage, traditionnellement réservé à des locaux de service. Certes, il y a le double escalier monumental intérieur, mais il n’arbore que des bannières à la gloire de l’Euro 2016. Je cherche sur mon smartphone des indices pour savoir 1) si ça a enfin ouvert 2) par où on accède à ce fameux « rooftop » (oui, même le nom est prétentieux, ça commence bien).
Je tombe sur moult et moult articles élogieux des sites de sortie plutôt parisiens (le Figaro, le Bonbon, Parisbouge, Anousparis, Sortiraparis…), expliquant que c’est le 3e Perchoir créé par la même bande de joyeux trentenaires qui allait ouvrir le 21 juin, et que ahlala ça va être top chouette, trop stylé! (même s’ils n’y avaient pas encore mis les pieds vu que ce n’est pas encore ouvert. Miracles du copinage et/ou du publi-rédactionnel). Deux autres parus un peu plus tard et avec des photos annoncent une ouverture au 1er juillet – dont celui de Grazia, dont j’ai tiré quelques phrases ci-dessus).
Ah ça, leur plan comm’ est au point, pas de doute. Ils sont beaucoup moins bavards sur leurs ratés au démarrage, vu que nulle part il n’est fait mention du fait que ça n’a pas ouvert le 21 juin comme prévu… et encore moins de pourquoi. Sur leur page Facebook, pas plus de nouvelles, si ce n’est un discret post le 2 juillet annonçant leurs premiers invités musicaux. D’où l’on peut inférer que ça a ouvert. Ou pas : après tout, quand le centre commercial Beaugrenelle a ouvert à grand renfort de publicité – et avec un mois de retard -, le cocktail d’inauguration avait lieu au Bermuda Onion. Mais quand j’y suis passée le week-end d’après, le restaurant était en fait fermé… toujours pas terminé. Comme d’ailleurs une partie des magasins du centre. Comique.
En revanche, sur la même page, je m’attarde sur l’onglet « Reviews », toujours instructif. Et après avoir lu l’article cité ci-dessus, de toute évidence l’expression « le tout Paris » porte mal son nom, vu qu’il y a peu de gens qui réussissent à accéder aux Perchoirs existants… En témoignent les nombreux récits de gens ayant fait jusqu’à une heure de queue pour s’entendre donner des excuses foireuses pour leur interdire l’entrée par un vigile comparé à « Terminator, sans le processeur », probablement homophobe. Un lieu où on refuse du monde même quand la salle est quasi-vide… De toute évidence également, Grazia et moi n’avons pas la même conception de l’expression « lieu convivial ». Pour ceux qui ont réussi à entrer, ça disserte sur l’absence de mojito et le barman qui se moque du client si tu en commandes un, le cocktail à 14 Eur, le jus de tomate à 6 Eur, et les serveurs qui se moquent aussi du client et qui mettent 2h à t’apporter la mauvaise boisson.
En clair, l’illustration parfaite de mon article sur la différence entre endroit chic et endroit branché :
dans un endroit branché, on te servira de la m*** que tu seras tenu de complimenter, et si tu n’as pas le bon look on te collera au fond et on te servira après tout le monde en te faisant la gueule.
De toute évidence, les Perchoirs sont l’archétype du genre (ils ne laissent même pas entrer, d’ailleurs). Ca me coupe l’envie de tenter de vérifier de mes yeux. Je ne suis pas assez Parisienne pour avoir le snobisme de payer des cochonneries pour en plus me faire traiter de haut, et prétendre que c’est trop bieeeen tu peux pas comprendre. Si je veux une belle vue sur Paris, il y a toujours Montmartre – et vu le quartier de la gare, ça ne peut être que mieux. C’est vrai, la concentration de « beautiful people » au mètre carré est sans doute moins élevée, vu que, horreur! ils laissent entrer toute la populâaaaace, mais comme cela va généralement de pair avec la concentration de « gens qui ont la tête comme un melon », ma foi, je préfère… Et si je veux une cour élégante mais de bonnes choses dans l’assiette et un service à la hauteur du tarif, il y a toujours le Park Hyatt Vendôme, l’Hôtel de Sers ou autre. Votons avec notre portefeuille…
Haha, j’ai tellement aimé le passage « miracle du copinage » ! C’est vrai dans beaucoup trop de domaines actuellement.
Copinage ou contre-partie d’une invitation gratuite… J’imagine qu’ils invitent ce genre de journalistes parce qu’ils savent qu’ils vont forcément leur passer la brosse à reluire. Ca doit être le genre de public qu’ils recherchent en plus. Le plus agaçant c’est que malgré un service minable, ça suffit à remplir les deux Perchoirs existants… (bon celui-ci, par contre, depuis en bas je ne vois toujours pas grand-monde…).
C’est d’un snobisme affligeant.