

Night and sleep – Evelyn de Morgan
J’avais presque oublié, depuis cette époque, que mon intérêt pour Wilde s’était conjugué à celui pour sa période d’activité artistique en Angleterre. Il a favorisé, par les critiques d’art qui lui ont valu son début de notoriété, l’émergence des Pre-Raphaelite Brothers (PRB), courant que je qualifierais d’avant-coureur de l’Art Nouveau, et pour lequel j’ai eu, aussi, une phase de profond intérêt (avec lecture de différents ouvrages, expositions etc, quoi que, en France, ils aient été longtemps boudés au profit des Impressionnistes, leurs contemporains. Ce n’est pas que le monde de l’Art soit chauvin… mais si). Et donc, je fus ravie, en commençant l’exposition, de découvrir qu’elle s’ouvrait justement sur l’activité de critique d’art d’Oscar Wilde. Avec, outre des articles de sa main et des caricatures de lui, des oeuvres dont il avait fait l’éloge, plus ou moins rattachées à ce courant, et/ou au Symbolisme.
Tel : La mort et le sommeil portant le corps blessé de Sarpédon, de William Blake Richmond. Ou Love and Death, de George Frederic Watts. Ou encore Love and the Maiden, de John Roddam Spencer Stanhope, dont le rendu si particulier est dû à la technique dite tempera. Night and sleep, Evelyn Pickering-De Morgan (nièce de Stanhope).
Je retrouve l’impressionnant portrait d’Ellen Terry en Lady Macbeth, par John Singer Sargent, dont j’avais lu jadis la fascinante histoire : robe cousue d’un millier d’élytres de scarabées, irisées de vert. Il est exposé dans la salle mettant en avant les muses de Wilde, comme Sarah Bernhardt à qui il a écrit un sonnet. Il lui destinait également la pièce de théâtre Salomé, mais celle-ci fut interdite tout de suite. Des fameuses illustrations d’Aubrey Beardsley pour le livret sont visibles un peu plus loin, ainsi qu’une affiche de Jacques Carlu de Geneviève Vix dans le rôle.

Ellen Terry as Lady Macbeth – Sargent
L’exposition rassemble la totalité des photos de Wilde par Napoleon Sarony, les portraits réalisés pour assurer la publicité de la tournée de conférences sur l’art que donna l’écrivain à travers les États-Unis en 1882. Elle est aussi parsemée de ses aphorismes aux murs, tels :
To love oneself is the beginning of a lifelong romance
Les nombreux documents manuscrits n’intéressent pas que les lettrés : durant ma visite, une adolescente s’extasiait à sa mère que Wilde n’a fait qu’une faute de français dans l’une de ses lettres. Francophile, il séjourna plusieurs fois à Paris avant son procès, y fréquentant le milieu intellectuel, d’André Gide à Mallarmé. Il y reviendra après sa libération de prison, y trouvant un relatif anonymat et un soutien qu’il ne pouvait plus espérer en Angleterre. Il mourra à Paris dans la misère, et sera enterré au Père Lachaise.

Love and the Maiden – Stanhope
Parmi les raretés, très intéressante, une vidéo où Robert Badinter dissèque les démêlés judiciaires de Wilde. D’un côté, il relève le fait que Wilde ait été condamné à 2 ans de prison pour des relations entre adultes consentants, chose pourtant banale à l’époque hommes du monde, et qui n’est plus illégale en France – prouvant la relativité de la loi (l’expo relate d’ailleurs que la loi en question était un ajout récent, en marge d’une loi visant à protéger les femmes souvent victimes d’abus). De l’autre, il explique que le père d’Alfred Douglas lui a tendu un piège en lui adressant à son club un carton le qualifiant de « Oscar Wilde posant au sodomite », et que poussé par Alfred qui espérait voir son père condamné, il est tombé dans ce piège, le procès en diffamation se retournant contre lui. Dénouement qui apparaît a posteriori comme un suicide juridique.
A noter un dispositif original autour de l’exposition, avec, outre un catalogue numérique disponible en plus de l’application (hélas uniquement pour iPhone… je suis sous Android et j’aime l’art, hein), une soirée « Born to be Wilde » qui avait lieu le 9 décembre et invitait les gens à venir en dandy participer à diverses animations, et même un MOOC (cours à distance) sur le site de la Sorbonne. Ah? J’ai raté l’interview de Merlin Holland, le petit-fils d’Oscar Wilde et co-commissaire de l’exposition.
Oscar Wilde, l’Impertinent absolu
du 28 septembre 2016 au 15 janvier 2017
Horaires :
Du mardi au dimanche de 10h à 18h
Fermé le lundi et certains jours fériés
Nocturne le vendredi jusqu’à 21h
Le samedi 14 janvier jusqu’à 21h.
Plein tarif : 10 euros
Gratuit jusqu’à 17 ans inclus.
Superbe ! C’est vrai qu’on a pas trop l’habitude d’entendre parler des Pre-Raphaelites en France
Ton commentaire avait été topé comme indésirable par WordPress, je viens seulement de le trouver dans la corbeille associée… Oui ils ne sont pas trop populaires ici, ni l’Aesthetic Movement en général. Pourtant j’ai retrouvé le catalogue que j’avais acheté d’une expo au musée d’Orsay, il y a deux ans je crois, qui était justement sur les arts à cette époque : Beauté, morale et volupté dans l’Angleterre d’Oscar Wilde.
http://www.musee-orsay.fr/fr/evenements/expositions/au-musee-dorsay/presentation-detaillee/article/beaute-morale-et-volupte-28910.html?tx_ttnews%5BbackPid%5D=649&cHash=959c802eb6
J’achète rarement les catalogues d’expo, mais celle-là était vraiment superbe et à mon goût. Il faut dire que si je me souviens, c’était une expo faite en collaboration avec le Victoria&Albert Museum.
Le succès de cet expo a peut-être encouragé le Petit Palais a faire quelque chose autour d’Oscar Wilde.
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