Non, je ne vous jetterai pas la pierre si vous avez vibré devant votre écran aux exploits des Bleus, ou des autres. Je ne vous traiterai pas de moutons, parce que savoir se réjouir n’a aucune corrélation avec l’engagement ou la conscience du monde, quoiqu’en pensent ceux qui veulent se donner bonne conscience. Je suis bien placée pour savoir que plus on est conscient du monde où on vit et plus on a besoin d’échappatoires et de loisirs « futiles » pour ne pas se faire sauter le caisson.
J’ai d’ailleurs regardé le match (un peu distraitement), même si je crois que ce que j’ai préféré, c’est la joie des vainqueurs. C’est toujours communicatif, je trouve. Et le but de Pogba, ma foi bien joué. *
Je suis assez vieille pour me souvenir de 1998, qui avait plus estomaqué, parce que c’était la première fois que la France parvenait à vaincre au plus haut niveau dans son sport de prédilection. A vaincre la malédiction de l’éternel second voire quatrième du podium. A l’époque, il y avait un petit goût de « Maintenant que c’est fait, on pourra le refaire ». Bon, ça a pris 20 ans.
Quand je dis « on », ce n’est pas comme si j’avais contribué, hein. Moi à l’école, quand on m’obligeait à jouer au foot en cours de sport, je mettais toujours un joueur adverse entre moi et le collègue qui avait le ballon pour éviter qu’il me le passe. Parce que sinon, comme je ne jouais au foot que contrainte et forcée, je perdais forcément le ballon vu que mon contrôle de balle était nul et mon physique aussi – dans des matchs mixtes, je vous laisse imaginer le résultat. Et d’expérience, je me faisais ensuite engueuler par mes condisciples. Donc autant s’éviter tous ces efforts perdus en m’assurant qu’on ne me passe pas ce fichu ballon qui n’a jamais été mon ami. Ce qui, en soit, demandait une bonne lecture du jeu. Une seule prof de sport s’en est rendue compte durant toute ma scolarité, c’est dire si ça changeait quelque chose.
Néanmoins, je ne suis pas non plus descendue dans la rue pour suivre les matchs en terrasse ou après la victoire, pour la célébrer à grand renfort de libations et d’exclamations.
Déjà, parce qu’en bonne introvertie, je déteste et je fuis :
– le bruit
– la foule
– la promiscuité non choisie
– les gens bourrés
Ce que la plupart des gens appellent « ambiance » avec enthousiasme, pour moi c’est plutôt un environnement désagréable.
Aussi, vous ne me verrez pas sur les Champs-Elysées un soir de liesse populaire, sauf si Babymetal y donne un concert. Ma seule tentative en ce sens m’a dissuadé de recommencer.
Réveillon, piège à c***
Le réveillon du 31 décembre 1999 est un de mes plus mauvais souvenirs de Paris. Arrivée peu avant dans la capitale, je suis allée avec quelques amis voir (en théorie) le superbe feu d’artifice annoncé à la Tour Eiffel, ainsi que les animations des Champs.
Las, arrivés péniblement au Trocadéro, j’avais devant moi une grande cruche arborant un de ces chapeaux festifs « du nord » de 30 cm. Avec mon format crevette, je ne voyais donc que le dernier étage de la Dame de Fer. Et on était trop serrés pour bouger beaucoup. Je lui ai demandé poliment si elle pouvait enlever son couvre-chef : pas question. J’ai donc vu 1/10e de feu d’artifice, tout en rêvant d’être fumeuse car alors j’aurais eu sur moi un briquet pour mettre le feu à son galure.
De là, le spectacle terminé, on joue les saumons pour remonter le courant vers les Champs-Elysées. Ou plutôt les sardines, vue la compacité de la foule. Mais les portiques enflammés de Patrick Bouchain s’étaient éteints en même temps que le bouquet final de la Tour Eiffel. Il n’y avait donc plus rien à voir sur les Champs. Par contre, j’ai cru que j’allais mourir étouffée dans les mouvements de foule. Par moments mes pieds ne touchaient plus par terre, et je me disais qu’il ne fallait surtout pas tomber sinon je serais piétinée. C’était il y 18 ans et je m’en souviens encore bien.
Ainsi que des crétins qui jetaient des bouteilles vides et des pétards par terre au moindre trou dans la foule, sans trop se soucier de la sécurité des gens autour. Je suppose que plusieurs cette nuit là ont perdu un doigt ou un oeil, et si ce ne sont que les lanceurs eux-mêmes, on s’en tire bien.
Il y avait des affiches partout en ville proclamant qu’il y aura des transports jusqu’au bout de la nuit pour l’occasion. Au final, j’ai été obligée de rentrer à pattes depuis les Champs Elysées, parce que ce que les affiches ne disaient pas, c’était que les transports en question, c’était juste les lignes de RER qui avaient quelques trains (1 par heure, de mémoire) desservant « la dernière station intra muros + la banlieue ». Et non la totalité ou même une partie du métro habituel… ni même le RER intra muros. RATP : rentre avec tes pieds.
En résumé : j’ai passé une soirée pourrie entourée d’une foule malpolie pour ne rien voir d’un show dont la pub ne donnait pas les infos essentielles. Les meilleures images du feu d’artifice, je les ai vues aux infos. Autant dire que j’ai entamé le nouveau millénaire en haïssant mon prochain, Paris et la RATP.
Et encore, je m’en tire à bon compte, vu que lors de la fête de la 1e victoire en Coupe du Monde de foot, sur les Champs-Elysées, une nana qui avait oublié de prendre ses cachets a foncé dans la foule avec sa voiture. Et à un autre réveillon sur les Champs-Elysées, une copine à moi s’est fait piquer son appareil photo. Faites la fête qu’y disaient.
Depuis, quand je passe le réveillon à Paris, je le passe en compagnie choisie loin des lumières des Champs-Elysées et de ses fêtards casse-bonbons.
*Anecdote inutile : le lundi suivant la 2e victoire de l’Equipe de France de football, alors qu’ils étaient attendus sur les Champs, j’ai traversé le Périphérique à pied (sur un pont, bien sûr). Des gens en maillot et brandissant des drapeaux bleu-blanc-rouge étaient massés le long des parapets, et le temps de traverser à la recherche d’un point de vue, j’ai vu les gens se disperser. J’en déduis que le bus des Bleus est passé sous le pont pendant que je le traversais. Je suis passée sur toute l’Equipe de France, quoi.