J’ai déjà reposté ici-même divers articles parlant du projet de George Sluizer de terminer le montage de Dark Blood, le film sur lequel travaillait River Phoenix en 1993, dont le tournage fut interrompu définitivement par son décès par overdose.
Grâce au financement du Netherlands Film Fund et de fonds rassemblés par crowdfunding via le site Cinecrowd, le réalisateur George Sluizer a pu achever le montage et ajouter de la musique.
Le film a été présenté jeudi 27 septembre en avant-première lors du Netherlands Film Festival, à Utrecht. J’ai eu la chance de pouvoir y assister.

En guise de mise en bouche, je suis d’abord allée au Wolff City, l’un des cinémas de la ville, qui diffusait dans le cadre de l’hommage à Sluizer rendu par le festival, un documentaire datant de 2006 qui lui était consacré, Filmen Over Grenzen. Ne parlant pas le néerlandais, je n’en ai compris que la moitié, à savoir les interviews en anglais de divers collaborateurs, mais c’était déjà instructif. Ils évoquaient notamment des tensions sur le tournage de Dark Blood, dues à des frictions entre les tempéraments opposés de Judy Davis, l’actrice principale, et de George Sluizer. Comme le résume Nik Powell, l’un des producteurs du film, « Two control freaks on the same film are always a pain in the ass ». Ca, c’est fait…
J’ai également apprécié le cadre, car le Wolff City a une décoration très arty, on sent les amoureux du film.
Ensuite, direction le Stadsschouwburg (théâtre municipal), devant lequel trône le fameux Veau d’Or qui donne son nom aux prix décernés lors du festival.
Le tapis rouge était déroulé pour l’occasion, et la salle était pleine. La présentation de ce film au casting international, qui aurait dû voir le jour il y a 19 ans, avait attiré du beau monde.

Dark Blood – le film : verdict
Alors, comment le film s’en tire-t-il, alors que seules 84% des scènes prévues avaient été tournées? Pas mal du tout, en fait. Par chance, les scènes tournées constituent des pans assez longs de l’histoire, de sorte que même amputé comme il est, l’ensemble parvient à plonger les spectateurs dans l’histoire. La fin, notamment, est quasi complète par rapport au script de Jim Barton. Le jeu des acteurs (River Phoenix, Jonathan Pryce et Judy Davis en tête) et le scénario, original, nous emmènent dans le désert aride de l’Utah pour ce huis-clos à ciel ouvert.

L’histoire : un couple de touristes, Harry, acteur en difficulté, et sa femme Buffy (Pryce et Davis), partis en week-end en amoureux sans leurs enfants pour sauver leur couple qui bat de l’aile, se retrouvent en panne de voiture au milieu de nulle part. Ils sont secourus par un jeune homme (Phoenix), qui vit seul depuis que son épouse indienne est morte d’un cancer dûs aux radiations des essais nucléaires réalisés dans la région. Depuis, il est devenu obsédé par l’idée de survivre à la guerre nucléaire qu’il est persuadé devoir arriver. Troublé par Buffy, il ne se presse pas pour permettre aux visiteurs imprévus de reprendre leur route. Harry n’apprécie guère.

Le film s’est terminé sous deux salves d’applaudissements nourris. Peu après, George Sluizer, affaibli par la maladie, est monté sur scène, et a eu droit à une longue standing ovation. Dans un discours plein d’émotion mais aussi d’humour, il a rendu hommage à tous ceux qui avaient permis au film de voir le jour, à l’époque du tournage en 1993, et presque 20 ans après. Les absents, comme River, Jonathan Pryce qui joue actuellement Macbeth sur la scène à Londres. Les présents, comme Ed Lachman le directeur photo, James Michael Taylor à qui il a confié les chansons, George Aguilar qui joue un des Navajos du film, sa fille Anouk et sa femme Anne…

Une longue liste.
A présent, reste à espérer que le film trouve un distributeur pour une sortie mondiale. Le producteur de l’époque, Nik Powell, s’était montré assez réservé sur l’opportunité de terminer le film il y a quelques semaines. Jeudi soir, il a dit sur scène à George Sluizer qu’il était sceptique initialement, mais qu’après avoir vu le film ce soir-là, il trouvait que, comme on dit chez lui, « Boy done good ». Le gars a fait du bon boulot. Cela résume mon opinion.
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