Lecture / portrait de fan : Prince – fragments d’un discours de fan, de Fanny Capel

Un voyage en train m’a enfin fourni le temps de lire ce document paru en février dernier aux éditions Le Rouergue, collection La Brune. Je l’ai découvert par hasard en musardant à la belle librairie MK2 du bassin de la Villette (de l’intérêt des vraies librairies IRL, qui ne mettent pas que les Marc Lévy en présentoir. Je n’ai rien contre Marc Lévy, mais quand il sort un livre, on le sait).
Le thème, forcément, a capté mon attention. Et le feuilleter m’a convaincu de l’acheter.
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Fanny Capel, l’auteur, est professeur de lettres, mariée, installée… Impossible a priori de deviner son autre vie, les 25 ans passés à suivre l’actualité de Prince. En particulier les quelques années de passion adolescente qui l’ont emmenée, elle et ses 2 meilleures amies, âgées de 20 ans alors, au club mythique du Love Symbol à Minneapolis, le Glam Slam Club. Ce qui, en août 1994, pour des jeunes filles tout juste sorties de l’adolescence et sans Internet, relevait encore plus de l’exploit que de nos jours. Un voyage qu’elle raconte en fin de livre, l’apogée de sa vie de fan. De sa vie tout court ? Elle se pose la question.
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Ne trouvant – comme moi * – aucun récit de ce que ça représente d’être fan, en dehors de caricatures tournées en dérision, elle voulait en témoigner de l’intérieur. Elle avait commencé à rédiger en ce sens ces « chroniques des années pourpre », il y a 3 ans, alors qu’elle sentait les souvenirs s’estomper. La mort de Prince en avril 2016 a complété le récit, y apportant à la fois une conclusion et l’éclairage d’une nouvelle vie « sans ».
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Fanny Capel ne voulait pas parler que de son expérience, mais plus universellement du statut de fan. Elle a complété ses souvenirs et ses notes de l’époque de témoignages de ses semblables. Faute de notes, j’ai photographié plein de passages où je me suis reconnue, ou bien où j’ai reconnu amies et connaissances de fandoms. Les voyages, les péripéties, les délires en groupe incompréhensibles aux « autres », les rituels de file d’attente des concerts… Cet univers parallèle qui embellit et enrichit toujours notre quotidien quand on entend une chanson familière, qu’on tombe au détour d’un zapping sur le visage qui nous fait sourire…
La rencontre tant espérée qui tourne au souvenir cuisant parce que dans des circonstances imprévues et défavorables, comme celle racontée page 73… (big up, inconnue de la Fnac qui s’était habillée relâche pour ne voir « que » les Revolution au lendemain d’un concert, le cheveu et l’oeil en vrac, et s’est retrouvée dans cet état face à un Prince venu dédicacer avec ses sbires… moi aussi, plusieurs fois j’ai croisé mes chouchous alors que j’étais en mode « off ».)
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Sur d’autres points, par contre, je me sentais en dissonance, moi la fan infidèle par excellence, en lisant ces souvenirs de presque 30 ans d’admiration ininterrompue.
L’artiste dont je suis « fan » depuis le plus longtemps sans interruption était mort avant que je ne découvre son existence. Difficile de faire des folies dans ces circonstances, et peu d’actualité à suivre. Et je n’ai cédé aux sirènes du portnawak (et eu les moyens de le faire) du type « je saute dans l’avion pour voir des gens qui ignorent que j’existe » qu’adulte. Ca n’a pas la même intensité qu’à 15-18 ans.
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Quoique, quand je pense à certaines de mes copines qui ont attendu encore plus longtemps que moi pour réaliser leur rêve, et à leurs réactions quand elles ont réussi… peut-être pas tant que ça. Peut-être que le facteur discriminant est seulement mon côté girouette, qui fait qu’ayant connu l’hystérie fanesque pour plus d’un groupe ou d’un artiste, j’ai du mal à ne pas relativiser les émotions qu’ils procurent. Surtout quand le premier fandom pour lequel j’ai fait les 400 coups a tourné en eau de boudin.
Ou juste le fait que je sois trop cynique, trop méfiante, trop parano, trop allergique à l’embrigadement pour hystériser devant un être humain. Même si j’ai buggé devant le minois de princesse égyptienne de Bill Kaulitz en 2009 parce qu’il était beaucoup trop belle pour être humain.
Oui j’ai encore les larmes aux yeux quand j’entends une version live de An Deiner Seite (ich bin da), mais je sais que c’est « juste » une conjonction : parce que c’était eux, parce que c’était moi, parce que c’était ce que mon cerveau avait besoin d’entendre à l’époque. Et pas une exception intrinsèque dûe à l’epoustouflifiance du phénomène ou des personnes.
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Et puis si, oui, certains souvenirs se renforcent parce qu’on les partage, je suis trop indépendante, -trop asociale-, trop habituée à ne pas attendre de complice. Sinon on ne fait jamais rien ou pas la moitié de ce qu’on voudrait… Donc une partie de mes souvenirs de fans, je les ai bâtis seule, ou avec des fans rencontrés sur place, pas forcément revus ensuite. Fanny Capel parle beaucoup de ses 2 complices de l’époque, qui ont partagé quasiment tous ses délires.
Mais en fin de livre, elle souligne que, maintenant que chacune a fait sa vie où Prince, par la force des choses, n’occupe plus que la portion congrue avant même son décès, elles se revoient très occasionnellement pour prendre des nouvelles, mais la réalité actuelle lui semble bien terne en comparaison de ses « années pourpres ».
Mais quand même, ce que raconte Fanny Capel dans une plume lyrique, qu’on ait été team Michael ou team Prince, ça rappelle des souvenirs.

Informations pratiques :
Prince, fragments d’un discours de fan
de Fanny Capel
Editions la Brune au Rouergue
Parution mars 2017

* quoique j’en ai trouvé quelques uns. Je vous ferai un article de la bibliographie qui a soutenu mon écriture d’un livre sur l’univers des fans. 

Portraits de fan : la liste complète

Au début je voulais faire du La Bruyère, mais finalement j’ai fait du Fan Actuel 😉

(P.S. : j’ai corrigé la mise en forme foireuse…)

Portrait de fan (1) : Le collectionneur

Portrait de fan (2) : l’analyste

Portrait de fan (3) : le militant

Portrait de fan (4) : le clone
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Portrait de fan (5) : le professionnel

Portrait de fan (6) : l’amoureux(se)

Portrait de fan (7) : la groupie

Portrait de fan (8) : la starfucker

Portrait de fan (9) : le stalker / harceleur
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Portrait de fan (10) : le narcissique

Portrait de fan (11) : Le BNF ou fan « famous » (célèbre)

Portrait de fan (12) : le coq de basse-cour

Portrait de fan (13) : L’aigri

Portrait de fan (14) : L’inspiré

Portrait de fan (14) : L’inspiré

« Tu as, mon sourire au bout des lèvres

Et mon regard dans tes rêves

Et si ça ne suffit pas

Mon piano fait des chansons pour toi »

Chanson pour une fan – Michel Berger

Description

En ces temps où on ne croit plus en rien, les idoles reprennent parfois leur sens d’origine, en incarnant des modèles auxquels croire et à qui se raccrocher. Cela est d’autant plus vrai que le fan se sent une ressemblance avec elle : des origines communes (ethniques, géographiques, sociales…), une histoire familiale ou sentimentale similaire, ou des aspirations semblables. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, cela ne touche pas que les adolescents en quête d’exemples à suivre à un stade où ils se demandent quoi faire de leur vie.

Je citerai par exemple Evelyn McDonnell, une critique musicale qui a écrit la biographie « Björk ; la fée septentrion ». Elle y raconte qu’elle a réellement commencé à admirer et étudier la chanteuse Björk lors d’un voyage en Islande, suite à une brutale rupture d’avec son mari. Jusque là, elle connaissait son œuvre pour l’avoir chroniquée dans son métier, mais sans être fascinée. La rage et l’énergie cathartique de Björk l’ont particulièrement touchée à un moment où elle se trouvait elle-même dans une situation émotionnelle intense, nécessitant un exutoire.

L’idole est alors une béquille spirituelle, qui peut être passagère ou plus durable, et aide à traverser les aléas de la vie.

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Archétype

Fabrice dans le film Jean-Philippe.

Avantages

L’enthousiasme est toujours communicatif.

Dangerosité

Quasi-nulle, sauf si on essaie de lui retirer sa béquille sans compensation.

Phrase fétiche

« Je ne sais pas ce que serait ma vie sans [idole]! »


Ceci clôt ma série de portraits de fans. La semaine prochaine, je posterai un récapitulatif des 14 portraits.

Portrait de fan (13) : L’aigri

« I guess this is our last goodbye

And you don’t care so I won’t cry

But you’ll be sorry when I’m dead

And all this guilt will be on your head »

Can’t stand losing you – Police

Description

L’aigri ne devrait déjà plus être fan. Mais comme une histoire d’amour qui finit mal et sur laquelle on n’arrive pas à tirer un trait, il ne parvient pas à quitter le fandom. Pourtant, à l’entendre, il n’aime plus rien de ce que fait l’artiste ou de ce qui se passe dans la série, ou si peu.

L’artiste est accusé de négliger ses fans s’il ne fait pas un concert dans l’arrière-cour de chaque fan (quand bien même il n’a pas vendu un album dans le pays en question depuis dix ans). Il trahit ses fans s’il fait une chanson trop rock, ou pas assez, ou si le clip n’est pas rose, ou blanc, ou bleu. S’il tourne dans des salles trop grandes (pas assez intimes) ou trop petites (ça manque de spectacle, et tous les fans ne peuvent pas en profiter). Il devrait organiser (à ses frais bien sûr) des séances de dédicaces, ou plus de séances de dédicaces parce que celles qu’il fait sont trop loin ou que tout le monde n’a pas pu y assister. Il devrait aussi sortir une version française de ses chansons, tiens, puisque tout le monde ne parle pas anglais. Et s’il fait quelque chose pour les fans, c’est forcément démagogique.

Les hyènes

Le fan aigri trouve également à redire à tous les aspects extérieurs à la simple création artistique : la tactique marketing, le design de la pochette… Le choix des acteurs ou des dates de sortie des DVD. La vie privée est également un terrain de discorde, à commencer par ses frontières : les artistes n’ont pas le droit de prendre des vacances loin des caméras, ils devraient toujours en révéler plus, puisqu’ils doivent la vérité à leurs fans. Le compagnon ou la compagne de l’artiste, s’il avoue en avoir un, n’est jamais bon pour lui.

C’est bien simple : tout ce que fait l’artiste est mal et va lui faire perdre encore des fans. D’ailleurs, le fan aigri est lui-même est très déçu par ce comportement et ne peut plus se considérer comme fan de quelqu’un d’aussi [insérer l’adjectif adéquat]. Il menace de quitter le forum, d’arrêter d’aller aux concerts et d’acheter des disques, ou de regarder la série. Pourtant, la semaine d’après, il est encore là, à haranguer les autres fans qu’il accuse d’avaler bêtement ce qu’on leur dit. Six mois plus tard, également. Un an après, on le retrouvera encore au premier rang du concert, et dès le soir même, il retournera sur le forum ou sur son blog pour dire à quel point c’était mauvais.

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Le fait qu’il insiste relève du phénomène psychologique bien connu d’engagement[1] : plus on a investi de temps et d’énergie (voire d’argent) dans un projet, plus on a du mal à l’abandonner, même s’il paraît évident qu’il est voué à l’échec ou qu’on n’a plus rien à en tirer. Cf toutes les mauvaises décisions dans lesquelles persistent nombre de dirigeants.

Pour s’en sortir, l’aigri devra passer par un stade de sevrage. Ceci arrive souvent après la goutte d’eau qui a fait déborder le vase (concert ou épisode raté, faux-pas majeur dans une interview…) et qui le poussera à s’éloigner à la fois de l’objet de son intérêt et des forums et cercles de fans qui occupaient une partie de son temps. Là, suivant les cas, l’aigri replongera si son environnement immédiat ne se prête pas à l’arrêt (stress extérieur, familial, travail, ou simplement ennui…). Ou bien, si les conditions sont plus favorables, ou s’il trouve un nouveau terrain de jeu (un nouveau fandom), il parviendra à tourner la page.

Oui, c’est exactement le même type de processus que lors d’un sevrage de produits addictifs (tabac ou autre), ou de relations toxiques. Le fandom est une drogue à sa façon, tout l’art consiste à le maintenir au stade de drogue douce, comme du chocolat.

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Archétype

Syndrome dans les Indestructibles.

Ou moi avec James Marsters, A-ha, et j’en passe (enfin, pour James, je m’étais sevrée en passant à d’autres drogues – Tokio Hotel en l’occurence -, je ne suis replongée dedans que parce que ça alimente le blog avec mes vieilleries. Et A-ha c’est récent, j’ai déjà fait une croix dessus à titre personnel, et j’aurais plus de facilité à ne plus en entendre parler si je n’avais pas encore tant d’amis et connaissances qui sont encore dans le fandom. Mais je ne regarde plus ça qu’avec du popcorn en souhaitant au groupe de couler. Kaaarma).

Avantages

On se dit qu’il y a toujours pire ailleurs et qu’on est donc soi-même encore un fan « raisonnable ».

Dangerosité

Les fans déséquilibrés qui s’en prennent à leurs anciennes idoles sont tous passés par là. Heureusement, la plupart se contenteront de pourrir l’ambiance des forums et des concerts de leurs remarques désagréables. Ce qui certes déplaisant en soi, et pousse les fans plus modérés à aller chercher ailleurs des interlocuteurs moins investis et moins critiques.

Phrase fétiche

« Puisque c’est ça, je m’en vais! » *envolée de cape*

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[1] Robert-Vincent Joule et Jean-Léon Beauvois, Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens, Presses universitaires de France, 1987

Portrait de fan (12) : le coq de basse-cour

« Ils travaillent tout comme les castors ni avec leur mains ni avec leurs… pieds »

Les Playboys – Jacques Dutronc

Description

Ce spécimen se rencontre dans les fandoms composés à 90% ou plus de fans féminins. Il part du principe qu’être l’un des rares mâles présents dans le milieu suffit à le rendre important. Et ce d’autant plus s’il s’agit d’un fandom de musique, car tout le monde sait que les femmes écoutent et jugent la musique avec les ovaires, alors que les hommes, eux, s’y connaissent (le gène de la science infuse en théorie musicale se trouvant sur le chromosome Y, coincé entre celui des compétences en mécanique et celui d’expert en football).

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Vous croyez que j’exagère? Sur un forum dont j’étais l’administratrice, l’un d’eux, arrivé récemment, qui postait très peu, pas très bien, et admettait n’avoir que peu de temps à passer sur le forum, m’a demandé de le nommer modérateur du forum, « en tant que seul membre masculin ». Texto.

Je ne sais pas sur quels critères les autres forums choisissent leurs modérateurs, mais la possession ou pas d’un pénis n’entre pas en ligne de compte, ce n’est pas avec ça qu’on tape sur le clavier. Je privilégie 1) une disponibilité qui leur permette d’être utile, 2) la confiance que je leur fais sur la base de leurs interventions passée, et 3) un bon jugement des gens et des situations.

Or le spécimen ne possédait aucune des qualités pré-citées, et n’en faisait pas mystère. Il a présenté la chose comme si ses attributs étaient une raison suffisante pour obtenir son galon de modérateur, alors qu’il n’aurait pas eu le temps de tenir le rôle. Ce qui, en soi, est un excellent indice qu’il n’est pas fait pour ça : d’expérience, les pires modérateurs sont ceux qui ont demandé à l’être.

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Dans le même genre, il y avait ce fan de James Marsters et habitué des conventions Buffy, qui estimait avoir droit à des privilèges dus à son statut de mâle. Par exemple, il exigeait de pouvoir poser plusieurs questions au Q&A, là où tous les autres n’avaient le droit qu’à une seule. Dans une file d’attente, convié à se déplacer par une jeune femme chargée de l’organisation pour ne pas bloquer les sorties de se secours, il lui a répondu que « ce n’était pas une nana qui allait lui donner des ordres ». Sic.

Certes, ce sont là des cas particuliers. Tous les fans masculins ne sont pas des cuistres, loin de là. Mais il semble que certains, plongés dans un environnement plutôt féminin, se sentent obligés d’en rajouter dans le machisme primaire. Peut-être pour prouver que ce n’est pas parce qu’ils aiment un groupe / une série plutôt suivi par des filles qu’ils sont moins masculins pour autant. Ou bien peut-être choisissent-ils d’être actifs dans ce réseau parce qu’ils peuvent y sortir du lot par le simple fait d’avoir un chromosome Y, faute de pouvoir se distinguer ailleurs par leurs qualités humaines.

Comme pour les BNFs, si ces comportements perdurent, c’est entre autres parce qu’il se trouve assez de gens qui les encouragent pour que cela donne des résultats. Dans ce cas précis, beaucoup de fans du genre féminin entourent d’attentions particulières tout spécimen mâle, qu’il soit ou pas pourvu de qualités propres. Quand il l’est, ça se comprend : les fans ne sont pas asexués, et un concert ou une convention est un lieu de rencontre comme un autre. Mais dans le cas du macho malpoli de mon 2e exemple, il y a de quoi se poser des questions.

Et quand j’ai parlé à des membres assidues de mon forum de la demande du 1er exemple, elles ont pris sa défense et conclu que j’avais un problème avec les mecs (enfin, celles qui, je l’ai su plus tard, communiquaient avec lui via MP hors forum. Ah ben oui mais moi tout ce que je connaissais de lui, c’était ses 3 posts sur le forum… Je ne lis pas dans les pensées). Non, j’ai un problème avec les gens qui demandent à être nommés à des responsabilités comme si c’était juste une médaille du mérite, alors qu’ils n’ont même pas l’intention de faire le travail qui va avec. J’ai aussi un problème avec les gens qui ne se définissent que par leur genre. Si tu ne te considères pas d’abord comme un être humain doté de tout un tas de caractéristiques, dont le genre, il y a des chances que tu traites les autres aussi uniquement sur la base de ce qu’ils ont dans le slip.

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Il semble aussi que certaines femmes aient intégré le sous-entendu négatif qu’une fan compte moins qu’un fan pour la crédibilité d’un groupe, au point qu’elles se sentent valorisées par le fait que leur fandom compte aussi des hommes. En tout cas, un fan (de sexe masculin donc) aura plus de chances de pouvoir discuter d’égal à égal avec un musicien qu’une fan. La fan est toujours soupçonnée de pouvoir virer à l’érotomane hystérique, et de n’être là que pour le glamour. Elle ne sera généralement autorisée à s’approcher que si elle est jolie et que le musicien a besoin qu’on flatte son ego (ou une certaine partie de son anatomie). A moins qu’elle ait quelque crédibilité artistique de son côté – si elle fait elle-même partie d’un groupe ou joue d’un instrument. Busty, elle-même critique musicale, souligne bien le phénomène dans son livre « Groupies! ». Rien de plus qualifiant pour avoir droit au chapitre en coulisses que de maîtriser soi-même un symbole phallique par excellence : la guitare, le micro, à défaut le stylo.

Le pendant féminin du coq de basse-cour se rencontre dans les fandoms plutôt masculins comme les comics, ou les passe-temps comme les jeux de rôle ou les jeux vidéos – encore que le public de ceux-ci soit devenu largement plus mixte depuis une dizaine d’années. Pour citer une geekette interrogée dans le documentaire « Suck my geek »[1], « on peut être féminine et poutrer du zombie ». Cela leur vaut une certaine attention de la part des joueurs et fans mâles, et certaines en jouent – et voient d’un mauvais oeil l’arrivée d’une concurrente. Etant peu présente dans ce type de fandoms, j’ai du mal à estimer l’ampleur du phénomène.

Les poules de basse-cour se rencontrent aussi (voire plus) dans les fandoms féminins, d’après mon expérience, où il y a émulation des tendances girly. Mais dans ce cas, il n’y a plus cet aspect « je suis le seul représentant du sexe opposé dans le groupe et j’ai donc droit à un traitement spécial de ce fait ».

poules et coq

Archétype

Pas encore traité dans la fiction à ma connaissance.

Avantages

Met en valeur les fans civilisés.

Dangerosité

Tendance à se croire irrésistible, et peut-être même tout permis.

Phrase fétiche

« En tant que mec, … »

[1] Documentaire de Tristan Schulmann et Xavier Sayanoff sur la culture geek

Portrait de fan (11) : Le BNF ou fan « famous » (célèbre)

« On the step outside you stand

With your flowers in your hand, my apple scruffs »

Apple ScruffsGeorge Harrison

Description

Le BNF est un fan narcissique qui a réussi – en tout cas à devenir quelqu’un parmi les fans. BNF est l’acronyme de Big Name Fan, un fan dont le nom (ou le pseudo) est connu, en général des autres fans, et parfois même des artistes. On les appelle plutôt des fans « famous » en français, si je puis dire vu que le terme est la traduction anglaise de célèbre. Suivant le type de fandom (musique, bande dessinée…), ils peuvent avoir d’autres noms, comme la mafia du 1er rang, les habitués…

Ce sont les gens qui ont accès à des informations que les autres n’ont pas (par relations dans les médias, avec les artistes ou leur entourage), ou les auteurs de fiction les plus prolifiques et les plus recommandés, ou les artistes les plus doués – ou les plus suivis…. Car tout comme les professionnels du spectacle, ce n’est pas le talent seul qui dicte la popularité. Le réseau et l’adéquation avec les attentes du public comptent tout autant.

Se faire reconnaître et immortaliser, au mieux par les artistes eux-mêmes, mais au moins par les fans, voilà le rêve de la plupart des BNF. En fait, ce sont souvent les fans qui ont employé avec succès certaines des recettes du chapitre « 10 façons de devenir populaire dans le fandom ». Mais les BNFs n’ont pas tous atteint leur statut par arrivisme et par un choix judicieux du sujet à la mode.

Dans l’ensemble, ils sont réellement passionnés par leur sujet. J’ai croisé plus d’une innocente auteur de fan-fic ou de fan-art dépassée devant la ferveur de ses lecteurs, et mal à l’aise en découvrant ce que ceux-ci sont prêts à faire pour se rapprocher d’elle. Parfois, c’est un simple concours de circonstance. Ainsi Lola, fan des 2B3, était reconnue des autres fans du groupe d’après son tatouage en l’honneur de Filip, après que celui-ci en ait parlé à la radio. Cela ne va pas sans risques : elle raconte [1] que des fans jaloux avaient même envoyé des lettres d’insultes au groupe en son nom, avec ses coordonnées, afin de lui nuire. C’est le revers de la médaille : toute montée vers la gloire, fut-elle futile et limitée, entraîne toujours à la fois l’admiration de certains et la rancœur d’autres.

Ecole des fans

D’autres au contraire, bien que tombés là par hasard, y découvrent un soutien inattendu qui leur permet de prendre confiance en leurs capacités. Ils peuvent vite se prendre au jeu de leur propre importance, flattés par des admirateurs d’autant plus fervents, semble-t-il, que le public est limité. Le succès monte facilement à la tête, et les amateurs n’échappent pas à la règle.

C’est que les artistes qui sont à l’origine du fandom sont en général inaccessibles : ceux qui sont sur scène et qui ont des millions de fans, ou ceux qu’on ne voit qu’à travers un écran de télévision ou de cinéma. En dehors d’envoyer un tweet ou une lettre au fan-club comme une bouteille à la mer, ou d’une séance de dédicaces, il est rare de pouvoir échanger avec eux. Les BNFs, par contre, fréquentent les mêmes forums et les mêmes lieux que les autres fans. On peut donc leur parler, et même devenir (plus ou moins) ami avec. C’est plus valorisant.

D’autres, par contre, cultivent ce statut à dessein, par des jeux de pouvoir et d’intrigues dignes des couloirs de la présidence. Ils peuvent devenir tout aussi manipulateurs et suffisants que s’ils étaient eux-mêmes le sujet principal du fandom – ce qu’ils en viennent parfois à croire. Le plus désolant, à mon sens, est le nombre effarant de personnes qui adhèrent à ces comportements, flattant leurs instincts pour se rapprocher de ces substituts de vedette. C’est ce qui permet aux BNFs de prospérer, soutenues par des lieutenants prêts à tout pour profiter des miettes de leur pouvoir.

La grande majorité des autres membres n’osera rien dire, de peur de se faire déchiqueter virtuellement sur les forums ou de se voir privé d’informations. En particulier, les fans moins acharnés éviteront généralement de s’y frotter en bien ou en mal, tout simplement parce que eh, il faut arrêter, ce n’est qu’un fandom après tout, on ne va pas se lancer dans des guéguerres de tranchées juste pour ça, on n’est plus à la maternelle…

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Archétype

Les Apple Scruffs de la chanson en exergue sont peut-être le must de ce que peut espérer une BNF : il s’agit d’un groupe de jeunes femmes, fans des Beatles, qui passait des heures et des jours devant les maisons des membres du groupe. Ceux-ci ont écrit non pas une, mais deux chansons à leur sujet : celle-ci, de George Harrison en solo, et en tant que groupe, She Came In Through The Bathroom Window. Comble du chic : le magazine Rolling Stone leur a même consacré un article en 2014. Plus d’informations sur cet article du blog de Richard Oliff.

Avantages

La productivité à l’origine de son statut, pour les artistes et compilateurs d’information.

Dangerosité

La plupart des BNFs sont, en eux-mêmes, moins enclins à nuire que leur entourage. En revanche, ils font souvent l’objet d’un culte de la part d’autres fans, qui les défendent bec et ongles à la moindre once de tentative de désaccord avec leur gourou.

Phrase fétiche

Aucune, ce n’est pas la phrase qui fait le BNF, c’est le ton péremptoire et je-sais-tout.

[1] Eliane Girard et Brigitte Kernel, Fan attitude, Librio, 2002

Portrait de fan (10) : le narcissique

«  Need that picture of you

It’s so magical

We’d be so fantastical »

Paparazzi – Lady Gaga

Description

Le narcissique est aussi fan de lui-même qu’il l’est de sa prétendue idole, voire plus. Certes, il aime son oeuvre – du moins on l’espère -, mais il cherche surtout à exister à travers l’artiste. Cela prend plusieurs formes. Parfois, il est fan parce qu’il croit avoir certains traits en commun avec lui. On constate par exemple que les artistes « un peu enveloppés » fédèrent beaucoup de gens en surpoids, les geeks admirent les geeks qui réussissent, etc. Quoi de plus compréhensible, quand on se sent sous-représenté dans les médias. Cela réconforte de voir des modèles positifs à son image, et qui sont également appréciés par le public. Et puis, il aura forcément une chose en commun avec l’artiste, puisque rares sont ceux qui ne sont pas égocentriques…

Quelle que soit la raison, le narcissique va d’abord chercher une validation dans le regard de son idole. Bono dit que les fans qui se sentent les plus attirés par les stars sont ceux qui, au fond, sentent qu’ils pourraient eux-mêmes monter sur scène ou être à leur place. Il n’est donc pas surprenant qu’ils emploient les mêmes astuces pour sortir du lot : look extravagant, comportement outrancier, gimmicks. Comme ces fans qui se mettent toujours au même endroit dans la salle, ou ceux qui brandissent toujours le même drapeau. Celle qui arbore un faux tatouage sur son visage à chaque rencontre avec son idole. Se faire remarquer lors d’un concert (d’où la course au premier rang et l’escalade dans les pancartes « choc »), le croiser assez souvent en séances dédicaces ou tapis rouge pour se faire reconnaître.

Autant de moyens de sortir de la masse de visages anonymes, de ne plus être un fan comme tous les autres. Faute d’obtenir cette reconnaissance, ou comme elle atteint rarement un niveau suffisant pour satisfaire son ego, le fan va chercher à susciter l’admiration de ses pairs. Il va pour cela se poser en fan numéro un, celui qui a fait le plus de concerts, qui connaît le mieux la chronologie de sa carrière… Photos de lui et de la star à l’appui. Il y a le petit côté « J’y étais! » du témoin d’un événement historique.

On a tous ce petit travers, sans doute. Car il est difficile de distinguer le légitime plaisir de se remémorer de bons moments de la vantardise mesquine étalée pour susciter la jalousie des autres fans. Où est la limite entre l’envie de communiquer avec l’artiste, en retour de ce qu’il partage par son art, et le besoin parfois maladif d’obtenir son attention et celle des autres fans?

La limite, c’est de ne pas parler plus de soi que de l’artiste sur les forums qui lui sont consacrés. Ceci dit sans viser personne en particulier, bien sûr.

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Archétype

Le personnage de Robert de Niro dans La Valse des Pantins de Martin Scorsese.

Avantage

Il est prêt à investir beaucoup de temps et d’argent en matériel et en voyages pour ramener des histoires exclusives et de meilleures vidéos que les autres.

Dangerosité

Il a d’abord un côté pénible, surtout lorsqu’il oublie même de parler de l’artiste et ramène tout à lui-même avant tout. Il est aussi plus susceptible de mal tourner ou de dramatiser, car du fait de son identification excessive à son idole, tout écart de celle-ci, et toute attaque envers celle-ci, est perçue comme une blessure à son amour-propre.

Le top du top du pire que j’ai rencontré, outre cette peintre qui offrait aux acteurs de Buffy ses toiles les représentant, c’est quand même une fan qui avait commandé le DVD de la tournée d’adieu (… ah, ah) de A-ha (celle de 2010, je précise, vu qu’il y en aura sûrement une autre un jour) sur un site allemand. Apprenant par des amies allemandes qu’elle figurait sur le documentaire du making-of parmi les fans interrogées durant l’attente, elle a demandé partout si quelqu’un pouvait lui ripper la vidéo en question pour la lui envoyer par mail… alors que de toute façon, elle allait recevoir le DVD dès que la Poste aurait fait le chemin de l’Allemagne à son coin de France. 2 jours. Elle a fait suer le monde pour voir sa trombine sur une vidéo officielle 2 jours plus tôt.

Alors les autres, je ne sais pas, mais moi, quand je regarde un live d’un groupe que j’aime, c’est pour regarder le groupe, pas les fans.

Phrase fétiche

« J’y étais, c’était trop bien! »

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Portrait de fan (9) : le stalker / harceleur

« I loved you Slim, we could have been together.

Think about it, you ruined it now »

Stan – Eminem

Description

L’étape ultime de la fan-attitude, quand l’obsession tourne à l’aigre.

Le harceleur est souvent, à l’origine, un fan lambda, bien intentionné. Et puis, sans que l’on puisse forcément définir pourquoi, il glisse peu à peu vers un comportement de plus en plus obsessionnel et possessif. Il estime que la star lui doit quelque chose : plus d’attentions particulières, plus d’interaction avec les fans, ne pas se comporter trop sexuellement… Et comme il n’obtient pas ce qu’il veut, il va de plus en plus loin pour se faire remarquer, fut-ce en mal.

Quand on discute avec des fans qui sont déjà bien engagés sur cette pente glissante, ils ne considèrent pas que leur comportement soit inapproprié. Ils partent du principe que, puisque l’artiste a choisi un métier public, même sa vie privée appartient à ses fans, sans souci pour la santé mentale de leur idole. Eric Cordobesse et Laurent Muldworf soulignent bien dans leur livre « Succès Damné«  les dangers liés à la négation du droit à l’intimité. Ce comportement est d’autant plus fréquent de nos jours, alors que la télé réalité a propulsé sur le devant de la scène des gens qui n’ont rien d’autre à vendre que leur quotidien, et qui le font donc volontiers.

Cela entretient la confusion avec les vrais artistes, qui sont avant tout sur scène pour s’exprimer. La plupart se contenteraient volontiers de créer de loin. Comme le dit Brian Molko de Placebo: « Nous avons aussi besoin d’avoir une vie privée, particulièrement quand on a une vie aussi publique que la nôtre. Alors je demande aux gens de respecter cela, car moi je le ferais pour eux et je le ferais pour n’importe quel artiste que j’admire ». Et s’ils utilisent leur image, ils en font aussi un champ d’expression artistique.

Les harceleurs considèrent que, l’artiste devant sa notoriété à son public, il n’a pas le droit d’exister ou de faire quoi que ce soit qui « trahisse » son public : changer d’image, de style…

anim_eminem_stan

Archétype

L’assassin de John Lennon ne l’a même pas suivi ou harcelé longtemps. La meilleure description du phénomène est donc le personnage Stan de la chanson d’Eminem. « Stan » est d’ailleurs passé dans le langage courant comme un terme décrivant les fans les plus assidus, que ce soit en négatif ou en positif. Si vous n’avez jamais prêté attention aux paroles ou que l’anglais n’est pas votre point fort, je vous recommande fortement de les lire ou leur traduction ici. Je considérais Eminem comme un énième crétin avant, et ça a suffi à me faire changer d’avis sur son potentiel d’auteur et humain.

Avantages

Aucun.

Dangerosité

Maximale.

Phrase fétiche

« C’est grâce à nous si tu es célèbre! »

Portrait de fan (8) : la starfucker

« Now I belong I’m one of the chosen ones

Now I belong I’m one of the beautiful ones »

Starfuckers Inc. Nine Inch Nails 

Certains couchent pour réussir, pour elle (ou lui) c’est l’inverse : son critère de réussite est de parvenir à coucher avec son idole. Ou plutôt avec ses idoles : la starfucker convoite en général tout ce qui brille et qui est célèbre. Cela peut être une stratégie pour acquérir soi-même une notoriété, mais souvent l’objectif n’est que de remplir son tableau de chasse de têtes connues. Plus ou moins connues, d’ailleurs. Même les acteurs seconds couteaux en convention, et les membres plus obscurs de groupes de rock, voire même leur entourage (roadies, gardes du corps, manager, etc), en profitent allègrement – normal : ils sont plus accessibles.

Lors d’une convention Buffy, je me suis retrouvée dans un ascenseur avec une dizaine d’autres fans et l’un des acteurs invités. C’était l’un de ceux assez accessibles et assez peu connus pour se permettre de circuler parmi nous sans précautions particulière. Quelqu’un a plaisanté « On a un acteur avec nous, bloquez l’ascenseur! ». Son regard noir en retour m’a surpris, car il était d’habitude très débonnaire et blagueur. Il a expliqué que c’était moins drôle quand cela arrivait réellement, et qu’un jour en rentrant fatigué dans sa chambre d’hôtel après une séance de dédicace, il y avait trouvé une fan sur le lit… Cette situation pourrait sembler agréable à certains, mais ne l’était apparemment pas pour lui, d’autant qu’il voyageait accompagné de sa femme. Sans parler de l’aspect anxiogène que cela représente, de voir l’intimité de sa chambre forcée par un parfait étranger.

Ce qui m’a le plus étonnée était qu’il ait droit à ce type de surprise, car  je pensais jusqu’alors que seuls les sex-symbols et les stars pouvaient susciter des élans aussi extrêmes. Or, sans être repoussant, ce n’était pas un apollon, et la plupart de ses rôles étant masqués, il n’avait rien non plus d’une tête d’affiche. Il faut croire que l’aspect aphrodisiaque de la célébrité fonctionne dès un stade très bas de celle-ci, sur certaines personnes?

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Sable Starr, baby groupie, avec Iggy Pop

Archétype

Certaines de celles citées dans les livres sur les groupies, ou dans cet article, entre autres. Même si pour certaines comme Anita Pellenberg, le terme me paraît réducteur, pour avoir lu l’autobiographie de Keith Richards dont elle fut l’épouse plus de 10 ans et avec qui elle a eu 3 enfants. Pour Sable Starr en revanche, en photo ci-dessus, la reine des « baby groupies », c’est assez clair : Pamela Des Barres disait dans sa bio qu’elle n’avait pas apprécié du tout de se faire piquer la place par ces gamines qui, contrairement à la génération d’avant aimaient d’abord la musique et ensuite les musiciens. Ou alors c’était la jalousie qui parlait… La frontière est d’autant plus ténue entre groupie et starfucker que la définition de groupie est assez floue. Si vous en connaissez dans la fiction, n’hésitez pas à me les citer en commentaire!

Avantages

Fournit des anecdotes hautes en couleur – parfois à son insu. Vu sa grande facilité à sympathiser avec tous ceux qui ont un quelconque lien avec les célébrités, cela peut permettre de se faufiler dans son sillage… à condition de n’avoir aucune chance de lui faire de l’ombre, ou au contraire si on peut soi-même lui obtenir des entrées.

Dangerosité

Assez faible, sauf pour la solidité du couple de ses cibles.

Phrase fétiche

« Voulez-vous coucher avec moi ce soir? » (in French in the text. Vous seriez étonnés du nombre de gens de part le monde qui ne connaissent que cette phrase en français, et n’hésitent pas à vous la sortir à la première occasion)

Portrait de fan (7) : la groupie

« She waits at backstage doors for those who have prestige

who promise fortune and fame, a life that’s so carefree. »

Dirty DianaMichael Jackson

Description

La groupie se rêve compagne, muse et inspiratrice de son idole. Elle idolâtre ses illustres prédécesseurs, celles qui ont partagé la couche des grands (Jimi Hendrix, Jim Morrison…), qui se sont vues immortaliser dans des chansons. Elle aime la musique, c’est vrai, qui représente une bonne part de sa vie, et elle a généralement une bonne culture musicale. Elle aime les concerts, et s’amuser.

Elle aimerait surtout être entretenue dans une vie de bohème luxueuse, qu’elle idéalise complètement, avec une célébrité par procuration, sans avoir pour cela à effectuer le travail de fourmi qui mène à la gloire artistique (parce que le génie, c’est bien connu, c’est 5% d’inspiration et 95% de transpiration).

Malheureusement pour elle, de nos jours, tout artiste un peu connu se voit gratifié d’un entourage qui rend la présence d’une groupie superflue, et de gardes du corps qui font qu’une rencontre par hasard est quasi-impossible. Aussi, il n’y a plus guère de groupies qui « réussissent » en sortant de nulle part. La place est prise par les mannequins, actrices, attachées de presse, maquilleuses et autres jeunes femmes déjà dans le milieu, voire même musiciennes elles-mêmes. Elle sont parfois aussi des groupies, mais elles peuvent, elles, apporter à la fois l’inspiration et quelques connexions au musicien, ainsi qu’un supplément de célébrité grâce à la leur propre. Du fait qu’elles ont déjà une notoriété pré-existante à leur statut de « copine de », elles échappent à l’étiquette de groupie.

Et là vous me demanderez : pourquoi j’ai écrit « la » groupie, pourquoi je n’ai pas mis ce terme au masculin générique comme les autres portraits de fans? C’est parce que les groupies mâles, il y en a peu, ou en tout cas, pas pour les artistes femmes, ainsi que le rapportent la plupart des rockeuses dans cet article de Salon. Par contre, il y en a probablement pour les artistes masculins portés sur la chose. Encore que cet autre article laisse à entendre que la tendance est en train de changer.

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Archétype

Pamela Des Barres, qui a raconté ses exploits de groupie de Frank Zappa, Mick Jagger et autres dans divers livres. Ou Lori Mattix.

Avantages

Passionnée parmi les passionnés, elle fait partie de ceux qui connaissent le mieux la carrière de l’artiste.

Dangerosité

Faible pour les autres fans, si vous ne représentez pas un obstacle sur sa route vers l’Idole. En revanche, la groupie peut être dangereuse pour toutes les femmes qui ont l’occasion de réellement approcher sa cible. Elle est d’une jalousie féroce, et extrêmement possessive envers cette personne qui, la plupart du temps, ne la connaît pas.

Phrase fétiche

« I’m with the band. »